Poussières de 11 septembre

Même jour, même heure, même chambre. 10 minutes de battement entre nos arrivées. Portier, réceptionniste, concierge…Personne n’est dupe mais tout le monde fait comme si.
Allongé sur le lit dans un silence de mort, je joue avec l’interrupteur de la lampe de chevet : viendra…viendra pas…viendra…la porte vole.
- Quelle merde ! T’as vu les tours ? » me lance t-elle tout en remettant son alliance.
- Les tours ?
Son doigt vernis allume le poste, images en boucle  d’un ciel bleu où des avions viennent s’encastrer dans les tours du World Trade Center avec pour seule bande-son des cris d’horreur et de l’anglais gueulé non sous-titré.
- Un dans chaque tour…C’est leur patrouille de France locale ?
- Idiot, tu vois pas que c’est un attentat ?
- Les russes ?
- Les japonais aussi ? C’est fini la guerre froide…Les islamistes intégristes aux premières nouvelles…
- Ah ? Bon...Petite douche à deux ?
- Attends, j’ai envie d’en savoir plus.
Elle hausse le son et s’assied sur le lit, envoûtée par les images amateur qui passent en boucle sur la chaîne info continue.
- On a qu’une heure, on va pas la passer à...
- Ferme-la bon sang ! c’est moi qui paie de toute façon, qu’est-ce que ça peut te foutre ?
- Bah moi j’y vais, sous la douche…Ça m’intéresse pas ces infos trashs…
- C’est ça …À part la baise et tes bouquins d’auteurs salaces, y a pas grand-chose qui t’intéresse de toute façon…c’est toute la différence entre un amant et un mari, tu vois.
J’esquive et file sous le pommeau.
Ça brûle - pas l’eau, ses mots. Je tartine ma queue de gel douche, me branle sans rien imaginer ni penser à personne. J’éjacule amèrement.
Lavage, rinçage, retour en peignoir dans la chambre où je claironne :
- De toute façon j’ai plus env…
Elle s’est tirée.
A l’écran, les hurlements v.o. redoublent tandis que les tours croulent dans un nuage noir.

Canis canem edit

Souvent femme varie ; a fortiori quand elle est mal baisée.
2 ans après notre dernière sauterie, l’ultime avant sa mise en couple et ma mise au rebut, une ex amante me recontacte pour cause de misère sexuelle conjugale.
Au téléphone, voix lascive et un peu gênée, le clito sûrement rouge de honte, elle se propose de me rejoindre.
Une heure plus tard elle débarque à l’appart, jupe fendue, bouche glossée. Elle a le regard crève-la-dalle du marin en escale qui pousse la porte d’un bordel après 3 mois sur un rafiot.
Après un bon moment au plumard passé à rattraper le temps perdu, l’excitation retombe et on part pour un sale quart d’heure.
-  Je m’en veux tu sais….C’est un compagnon gentil, fidèle, aimant…
- Pas étonnant qu’il t’excite pas.
- Pourquoi tu dis ça ?
- T’en parles comme d’un clébard…Alors à moins d’être zoophile…
- T’as pas changé…Le cynique de la nique. Tu sais, si un jour tu veux que ça dure…
Je lui chope la main droite et la lui colle sur ma queue, déjà raide à nouveau.
-  Comme dirait le poète : «  moins ça dure, plus c’est dur » 
- Et inversement, tu penses, alors ? 
- Bah faut croire…
Tandis qu’elle recommence à m’astiquer, son portable laissé dans l’entrée soudain aboie.
- Quand on parle du loup…
- Du chien …et en plus t’as choisi la sonnerie jappements pour lui… Bah tu vois, je dis pas que des conneries…
- Toi aussi, t’es un chien, tu sais… probablement plein d’puces…de tiques…le genre bâtard errant, très attachant, en tout cas à mon goût…
Sa paume se fait plus ferme, son poignet plus rapide.
- …Ça fait sûrement de moi une chienne. »  conclut-elle d’un soupir tout en descendant sous le drap.
De l’autre côté de l’appart, le téléphone hurle à la mort.