Lie maternelle

Au téléphone, ses mots tanguaient.
De sa main tachetée tremblotante, elle m’invite à rentrer.  
Sous les poutres apparentes massives, une pochtronne dans sa porcherie.
La petite table basse croule sous les mégots froids. Pareilles à des baleines échouées, des bouteilles au goulot béant rendent un dernier râle liquoreux. Deux sacs de pharmacie dégueulent de petites gélules bleues, de moyennes pilules roses et de grosses granules blanches. Mouchetée de taches de graisse, une ordonnance cachetée du cabinet des associés et estimés docteurs A. BOULELEPEZ / A. DANSQUINZEJOURS posée là comme un mot d’adieu.
Et ça pue.
Elle qui baigne dans sa sueur de manque, de vieilles odeurs de plats en sauce sur des assiettes éparpillées, la litière du chat qui déborde...Le museau collé au velux, la bestiole aux côtes efflanquées miaule à la mort. J’ouvre, il se tire toutes griffes dehors.
- T’as apporté ?
Je sors la canette de ma poche, même pas le temps de la lui tendre qu’elle l’a décapsulée et pars la siffler dans sa chambre.
Je pose ma veste, retrousse mes manches et dans la moiteur de la nuit j’entame le récurage du lieu comme on irait fleurir une tombe.