I ♥ Paris

Nuit fraîche de printemps aux abords de la Tour Eiffel, épicentre métallique de la vie touristique française. Tandis que la vieille dame de fer balade son halo pâle dans le noir du ciel parisien, je bavasse en buvant du vin sur une des pelouses du Champ-de-Mars avec une fille croisée la veille dans un pub de troisième mi-temps. Italienne, en vacances dans la capitale, la fille a la descente facile et parle avec les mains.
Au détour d’une phrase elle s’emporte, envoie valser la bouteille de Chasse-Spleen qui se déverse sur le gazon.
À court de bibine, je propose une virée moto version Paris pour les nuls. La fille se marre.
- Sacré-Cœur…Invalides…Notre-Dame…Et après tu m’emmènes chez toi…Picolo, si tu veux me baiser, aide-moi plutôt à trouver ça.
Elle dégaine de son sac à main une boîte de Subutex vide ainsi qu’une ordonnance froissée.
Direction la place Clichy et sa pharma Européenne où la blouse blanche qui nous accueille est sans appel : ici ni stup’ ou substitut. Sentant ma ritale s’angoisser, je riposte :
- On va prendre du Néo-Codion. Cinq boites.
- Une seule vous est autorisée.
Je négocie deux boîtes de l’antitussif morphinique, méthadone du pauvre en vente libre.
Même topo au Drugstore des Champs et dans une officine de garde située avenue de la Grande Armée. Son shopping toxique achevé, je la raccompagne à son hôtel du 18ème. Elle m’invite à monter. Dans l’ascenseur, la florentine ouvre son sac et contemple ses six boîtes de codéine light d’un air béat.
- C’est la chose la plus romantique que tu pouvais faire pour moi…
Quelques minutes plus tard, tandis qu’allongé sur le lit je fixe une repro d’art abstrait accrochée de traviole au mur, elle surgit de la salle de bain exclusivement sapée d’un t-shirt taille XS siglé « I ♥ Paris ».