Le Cri

17 mai à Oslo, jour de fête nationale. Ma semaine scandinave chez une amante expatriée touche à sa fin ; l’avion décolle dans quelques heures. Sitôt sortis d’un petit restaurant dans le quartier Grünerløkka, elle propose une balade le long de la rivière Akerselva. Je grimace.
- J’aurais bien fait le musée Munch...
- J’ai une meilleure idée.
Elle m’entraîne par la main. Dans les rues animées, des drapeaux par dizaines flottent aux fenêtres, la ville respire la liesse citoyenne, la fierté patriote. La foule marche et pédale dans un parfait ballet.
On traverse un parc verdoyant, à la pelouse immaculée et aux bancs impeccables.
- C’est d’un propre…Pas un déchet, rien qui dépasse…
- L'esprit nordique.
Même topo dans le tram qui nous emmène plein sud.
- On s’croirait dans la 1ère du TGV…
Elle m’approuve d’un sourire en coin.
Descendus du wagon cinq étoiles, elle m’entraîne vers une promenade, longée d’une rambarde en métal.
- On est où ?
- Colline d’Ekeberg. Le lieu du Cri. Regarde.
Je m’accoude, distingue au loin le fjord d’Oslo avec en son extrémité l’opéra tout en marbre blanc et en verrières panoramiques. L’angoisse dans toute son angulosité.
- Et pourquoi tu resterais pas ? Je veux dire t’installer ici. Avec moi.
Je tourne la tête vers elle, bouche bée, sourcils haussés.
- Il te manque plus qu’les mains sur les oreilles. J’plaisantais, détends-toi. Alors, cette vue, mieux qu’un musée nan ?
J’acquiesce et la prends dans mes bras, nos yeux rivés vers la baie de Bjørvika.